Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Battants sur le toit
21 juillet 2006

Ce tableau dit plus qu'un autoportrait... Chaïm

Ce tableau dit plus qu'un autoportrait...

Chaïm Soutine, le désespoir à l'oeuvre.
Soutine a fuit le ghetto de Smilovitch pour se rendre jusqu'à Paris. Ses pieds ont dû en souffrir, et Paris n'est pas la capitale qu'il avait attendue, mais la vision désenchantée de quelque merveilleux mirage dont on ne se remet pas. L'âme russe ne sait pas emménager ailleurs que sous son propre toit. Tous les Russes en exil le savent qui n'ont jamais pu s'acclimater à d'autres moeurs... d'autres cieux.De sa prison de départ, il échoue en une autre : La Ruche de Vaugirard, où sont parqués les réfugiés politiques qui vivent dans la terreur et les drames de la misère. Cette misère a failli avoir raison de lui s'il n'avait pas été sauvé in extremis par un compatriote.Soutine noue avec les bouchers des abattoirs voisins des relations curieuses dont il observe avec détails les blouses ensanglantées, harnachées de terribles couteaux.De là sans doute lui vient ce goût des couleurs hautes en ton et en intensité. Mais, chez lui, la couleur prend le plus souvent des nuances assourdies, comme chuchotées. Là où Chagall affirme des couleurs éclatantes, il évolue dans des couleurs "mulâtres" ((verdâtres, bleuâtres, jaunâtres ou rougeâtres), sans céder pour autant à leur intensité convulsive. La fréquentation de ces abattoirs lui inspire volontiers des sujets de bêtes écorchées ou de quartiers de viande en décomposition. Toute sa peinture sera pour ainsi dire poussée par cette force de mort. Sa vie intérieure elle-même est hantée par un imaginaire désordonné dont il cherche inlassablement à donner un sens au point d'aller puiser à la source des maîtres du passé, de Rembrandt à Cézanne, qu'il ne cesse d'interroger sans jamais trouver pour autant de réponse susceptible de l'éclairer sur cette fascination inquiétante pour la mort. Si chagall pourra un jour proférer ce cri de joie : " Rembrandt m'aime!", c'est avec l'énergie du désespoir que ce fils de couturier continuera de peindre.Soutine restera inclassable, inaccessible à toute théorie artistique, son attachement irréductible à la mort ou au néant gagne par contagion toute sa peinure d'abord dictée par les émotions d'un écorché. "Dire ce qu'il a à dire, et par n'importe quel moyen, sera son unique loi". Son état émotionnel présidera toujours sur la technique ou quelque conception plastique. Cela n'aura jamais le sens d'un sacrifice. Ce sera simplement lui, Soutine, tel qu'en lui-même, étranger à lui-même, mais si immense d'avoir approché ce que personne n'a approché de si près : la mort.

Autre version :

Soutine a fuit le ghetto de Smilovitch pour se rendre jusqu'à Paris. Ses pieds en ont fait la rapeuse et âpre expérience, et Paris ne ressemble pas à ses rêves d'enfant-adolescent. L'âme russe ne sait pas emménager ailleurs que sous son ciel ténébreux. Tous les Russes en exil l'ont appris à leur coeur défendant qui n'ont jamais pu se greffer sur d'autres coeurs pourtant prêts à s'ouvrir... De sa première détention, il tombe en une autre : une Ruche où sont agglutinés des réfugiés politiques -compatriotes pour la plupart- qui vivent dans une grande misère. Cette misère a failli avoir raison de lui si l'un de ses amis  n'avait pas été là : la corde se balançait au dessus de l'abîme. Soutine noue (c'est déjà mieux que s'il l'avait noué autour de son cou) avec les bouchers des abattoirs voisins des relations qui relèvent, (c'est un avis personnel), d'une fascination morbide : les blouses ensanglantées, harnachées de terribles couteaux vont coloniser ses toiles. D'où ce goût des couleurs hautes en ton et en intensité. Mais, la couleur prend cependant le plus souvent des nuances assourdies, comme chuchotées, presque muettes. Là où Chagall fait chanter des couleurs éclatantes, Chaïm se glisse dans des couleurs "mulâtres" ((verdâtres, bleuâtres, jaunâtres ou rougeâtres), sans pour autant cesser d'être convulsives. Des bêtes écorchées ou de quartiers de viande en décomposition obsèdent sa toile. Toute sa peinture sera propulsée par cette force de mort. Sa vie intérieure elle-même est hantée par un imaginaire désordonné dont il cherche sans relâche à donner un sens au point d'aller puiser à la source des maîtres du passé, de Rembrandt à Cézanne, qu'il ne cesse d'interroger sans jamais trouver de réponse satisfaisante, susceptible de lui faire comprendre pourquoi, pourquoi cette fascination de la mort. Si chagall pourra un jour proférer ce cri de joie : " Rembrandt m'aime!", c'est avec l'énergie du désespoir que ce fils de couturier continuera de peindre.Soutine restera inclassable, inaccessible à toute théorie artistique, son attachement irréductible à la mort ou au néant gagne par contagion toute sa peinure d'abord dictée par les émotions d'un écorché. "Dire ce qu'il a à dire, et par n'importe quel moyen, sera son unique loi". Ses émotions prévaudront toujours sur la technique ou quelque conception plastique sans jamais prendre le sens d'un sacrifice. Ce sera simplement lui, Soutine, tel qu'en lui-même, étranger à lui-même, mais d'une telle audace, celle d'avoir approché de si près : la mort.

Publicité
Commentaires
Publicité