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Battants sur le toit
9 décembre 2006

PoezibaÔ que jamais

IMAGES____________J_rome_Bosch___Paradis___Enfer

J. Bosch plus actuel que jamais

Citation :

Anthologie permanente :
Wislawa Szymborska
sur Poezibao

LA FIN ET LE COMMENCEMENT

de Wislawa Szymborska



Après chaque guerre
quelqu'un doit faire le ménage.
L’ordre quel qu'il soit
ne se fera pas tout seul.

Quelqu'un doit repousser les gravats
sur les bords des routes
pour laisser passer
les voitures remplies de cadavres.

Quelqu'un doit s'embourber
dans la fange et la cendre,
les ressorts des canapés,
les échardes de verre,
et les chiffons sanglants.

Quelqu'un doit traîner une poutre
pour soutenir le mur,
quelqu'un doit vitrer la fenêtre
et raccrocher la porte sur ses charnières.

Ce n'est pas photogénique
et demande des années.
Toutes les caméras sont parties déjà
pour une autre guerre.

Il faut refaire les ponts
et les gares.

Les manches vont s'effilocher
à force d'être retroussées.

Quelqu'un, le balai à la main,
se souvient encore comment c'était.
Quelqu'un écoute
acquiesçant de sa tête non arrachée.
Mais déjà à côté d'eux
il y en aura
qui vont s'ennuyer.

Quelqu'un parfois encore
déterrera de dessous un buisson
des arguments rongés par la rouille
et les portera sur un tas d'ordures.

Ceux qui savaient
de quoi il s'agissait ici
doivent céder la place
à ceux qui en savent peu.
Et moins que peu.
Et enfin rien du tout.

Dans l'herbe qui a recouvert
les causes et les effets,
quelqu'un doit se coucher,
un épi entre les dents,
et bailler aux corneilles
dans les nuages.

Wislawa Szymborska,  Dans le fleuve d’Héraclite, traduction de Christophe Jezewski, Maison de la Poésie Nord/Pas de Calais, 1995, p. 203

Wislawa Szymborska dans Poezibao :
Note bio-biliographique, extrait 1, extrait 2, extrait 3


Je remercie Orlando de Rudder (dans mes liens) de nous avoir indiqué ce poème qui dit l'après qu'on ne montre pas, le cauchemar de l'après, le cauchemar après le cauchemar, celui que les caméras ont abandonné pour une autre brûlante actualité, comme si l'après n'était plus d'une brûlante actualité, comme si le cauchemar était devenu froid...

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