Courbet au Grand Palais
Gustave Courbet (1819-1877) est au Grand Palais. La polémique (vaine) autour de la prétendue lourdeur de sa peinture : exaltation de chairs opulentes, surcharge de la matière-couleur, n'a plus cours depuis longtemps. La question est ailleurs car Rubens, pour ne citer que lui, nous avait déjà habitués aux rondeurs soulignées de ses nus, à cette explosion de délicatesse et de sensualité. La critique en réalité porte davantage sur la maturité de ces nus marqués par le passage du temps, l'effroi que peut provoquer la vérité toute nue du sujet, sans artifices aucuns, dictée chez Courbet par un sentiment de devoir, de devoir montrer les choses dans leur crudité. Ainsi de "L'origine du monde" qui offre au regard un sexe, qui appartient bel et bien à une femme, mais ici, le sexe est traité comme un portrait, pour preuve ce cadrage relativement serré qui force le regard du spectateur, ne lui laisse le loisir d'aucune possibilité de se dérober. Ce sexe est un affront, il nous prend de front, ne nous ménage aucune possibilité de sortie. C'est en cela qu'il installe un malaise. D'ailleurs, son dernier acquéreur, qui n'était autre que Lacan, avait demandé à André Masson de lui confectionner une toile cache-sexe, comprenant bien qu'il ne pouvait découvrir et faire découvrir cette toile qu'à un public compté. Cette toile matérialise la rupture avec une longue tradition du nu, s'affranchissant d'une représentation d'un idéal de beauté, Courbet n'ayant jamais cherché à faire du beau. En tout état de cause, cette toile est réussie, pour parler comme les peintres. Non seulement réussie mais unique en son genre. Un coup de maître. Musée d'Orsay
La scénographie de cette exposition est particulièrement soignée : les oeuvres sont présentées mettant en perspective les influences qui ont traversé le peintre, tout en respectant les grands thèmes de son travail, cela en quelque 130 peintures et une trentaine d'oeuvres graphiques, plus documents divers.
L'exposition se découpe en huit moments :
"les autoportraits de jeunesse" comprenant "Le Désespéré", DR
"L'homme blessé" ou encore "L'homme à la pipe" travaillé en clair-obscur (Courbet avait beaucoup étudié Caravage). "De l'intime à l'histoire" regroupe des peintures sur ses proches, famille et amis,"Les manifestes" mettant en avant les grands formats : "Un enterrement à Ornans" et "L'Atelier du peintre". "Courbet paysagiste" qui avait fait l'objet d'une exposition à la Tate Gallery, "La tentation moderne", "Le nu, la tradition transgressée". "Le peintre animalier", "Courbet et La Commune"...