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Battants sur le toit
13 décembre 2006

Hommage à Paul Célan...

CORRESPONDANCE

PAUL CELAN/ILANA SHMUELI

Traduit de l’allemand

par Bertand Badiou

Éditions du Seuil

279 pages,

22

p. 31

LE MATRICULE DES ANGES N°78 

Droits Réservés

Amour et mémoire

CORRESPONDANCE PAUL CELAN/ ILANA SHMUELI

de Thierry Cecille

Une femme et un homme, ayant chacun

une vie derrière soi, lourde de douleurs et

de joies, de secrets et de doutes, l’un et

l’autre ayant déjà bâti un couple, ayant                                                

donné naissance – se rencontrent, se reconnaissent,

essaient alors de vivre un

amour, malgré les entraves intimes et la

distance – mais échouent. C’est une telle

tentative d’aimer – et, pour Celan, en outre,

un essai de survie – que nous pouvons découvrir

dans cette correspondance, brève

mais intense (l’essentiel des lettres est

écrit durant quelques mois, de l’automne

1969 au printemps 1970, le suicide de Celan

survenant en avril 1970).

Celan, poète de langue allemande, vivant

alors – difficilement – en France, se débat

en effet aux frontières de la folie, dans les

affres du doute sur soi et sur l’existence.

S’il commence à être reconnu, il n’en demeure

pas moins fragile : quand cette histoire

commence, il sort d’un séjour en asile

de quelques mois. Lui et Ilana Shmueli se

sont connus il y a bien longtemps, de

l’autre côté du monde,yiddishland 

qui disparaît définitivement avec la Shoah.

En 1944, après avoir enduré le ghetto et la

menace de l’extermination, Ilana parvient à

rejoindre, avec sa famille, la Palestine, et

Celan, lui, gagne Paris – mais ses parents

sont morts dans les camps. Dès lors il se

battra avec et contre la langue des bourreaux

– mais elle demeure aussi la langue

d’Hölderlin, de Rilke et de Kafka – pour dire

ce que peut être la vie dans un monde survivant,

en des poèmes à la syntaxe rude,

aux métaphores énigmatiques.

De tels poèmes, obscurs, nous en lisons ici,

certains sont offerts à Ilana, pour accompagner

ce que les lettres tentent de dire – ou

est-ce l’inverse ? Ilana effectuera deux séjours

à Paris, Celan, lui, la retrouvera, durant

quelques jours, à Jérusalem, qu’il découvrira

alors – bien entendu ces jours partagés vivifieront

ce qui entre eux s’établit et prend

peu à peu le nom d’amour – mais le fragiliseront

peut-être aussi. C’est que vivre au

présent, après un tel passé, exige des

forces que Celan, sans doute, ne possède

plus.

(...)

Et pour Ilana,« la rencontre avec Celan et son

douloureux débat intérieur sur les questions

d’identité et d’appartenance, sur les mots et

la langue, éveillèrent en

sentiment d’“étrangèreté”. »

Ilana ne cesse de lui parler, et lui

écrit donc bien plus souvent, et de manière

plus développée, qu’il ne lui répond. Elle en

prend son parti, elle sait sa douleur :

« là aussi un sentiment de profond respect,

presque une peur, de ta sensibilité presque

sismographique, qui t’expose tant à presque

tout ce qui te touche, même à moi. (...)

Relire les poèmes de Paul Célan

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