Troglodites
Ce poème est une dédicace faite à Alain Gestin, je l'ai écrit à la lumière de son espace, découvert sur son site. De ses grottes, il a fait un Belvédère pour dire la beauté des arts qui est abritée derrière ses murs. Alain Gestin occupe ce lieu étonnant, troglodyte, pour accueillir des artistes qu'il aime et se promènent dans le ventre de la terre, me perdant moi-même en ces salles souterraines j’ai soudain repensé à mes troglodytes chères, celles de Matmata ou d'ailleurs, mais qui sont plus qu'un lieu, un lieu d'expression, étrange connexion mais pas si étrange puisque la médiation fut créée par un ami. Ainsi, la formule se vérifie donc : les amis se ressemblent, il ne peut en être autrement, l'amitié est une chaîne quasi généalogique et géologique... même si nous ne vivons pas les uns les autres au même endroit... quelle importance puisque nous nous rencontrons tous les jours... avec des mots qui sont des marches
creusant à même la bouche terrestre, un regard sur le monde en négatif où l’obscurité a dompté la pierre, a adoucit le rêve de toute matière
de ces doigts rugueux retenant la lumière à pleine main
pour éclairer des charpentes voûtées, des voûtes retirées dans l’obscurité de la matière sans paupières, ni rideaux : le tout est l’ouvert et le pas balaie des interdits de poussières.
La lumière est à chercher dans des abris évidés par la caresse des alizés,
dans un labyrinthe élimé six pieds sous terre ;
dans la libre fraîcheur dissimulées en des murs volontairement austères.
Ces hommes du Mzab ou de Matmata préfèrent les terriers d’hier
et vivent encore dans l’anfractuosité de l’"à terre", le vif vagin de la première mémoire, riche vétusté d’une amante brisée entre des grains sommaires envolés des greniers arque boutés où se défait le regard de l’ivraie.
La peau tatouée de la pierre, rugosité indomptée depuis des millénaires,
a mis genoux à terre déposant sa vanité dans une cavité déterrée pour la tranquillité.